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fait le sens moral de beaucoup de citoyens. Il advient alors que des hommes probes et droits, ennemis de toute fraude et incapables d’accomplir par ailleurs un acte déshonnête, se laissent aller à de tels actes et même s’en glorifient parce qu’ils croient y avoir été incités par leur dévouement à la chose publique et par la nécessité de sauver leurs concitoyens d’un péril grave. Si ces hommes perdent à ce point le sentiment du devoir, il n’est pas étonnant que d’autres moins scrupuleux et moins estimables se livrent, sous prétexte de travailler au salut public, aux agissements les plus répréhensibles. C’est bien là l’histoire de la Révolution et de ses farouches sectaires parmi lesquels on ne saurait nier qu’il ne se soit égaré beaucoup d’honnêtes gens. La postérité déteste leurs crimes et avec juste raison ; la seule circonstance atténuante qu’elle puisse leur accorder, c’est précisément de constater que leur bonne foi fut surprise et qu’ils n’aperçurent point l’odieux de leur conduite. Mais cette expérience prouve combien les Français, dès que la conviction s’est établie que le salut public se trouve en jeu, diffèrent en quelque sorte d’eux-mêmes, puisqu’ils en arrivent à pratiquer ce pour quoi ils