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plus profonde. Le petit employé de Paris est, avant tout, méticuleux, lent à se mouvoir, esclave de ses habitudes ; il a horreur de l’initiative ; il craint par dessus tout les responsabilités et prend plaisir à se sentir « couvert » par ses supérieurs. Ce mot qui n’aurait point d’équivalent en Anglais, exprime le sentiment d’une sécurité engendrée par un mélange de paresse et d’égoïsme. Quoi qu’il arrive, se dit le subordonné, ce n’est pas moi qui en serai responsable ; il suffit que j’exécute à la lettre ce qui m’est prescrit sans jamais le dépasser d’une ligne et on ne pourra jamais s’en prendre à moi de ce qui arrivera. Ainsi raisonnerait, s’il pouvait raisonner, le piston d’une machine à vapeur.

Cet esprit là existe bien chez les fonctionnaires du rang supérieur ; mais eux du moins sont ambitieux ; ils tâchent de se pousser aussi haut que possible. Le petit employé n’a guère de ces ambitions ; son horizon est très borné ; il sait que, quoiqu’il fasse, il ne montera jamais très haut. Dans un roman laissé inachevé et publié tel quel après sa mort, Flaubert a décrit l’odyssée morale de deux petits employés Parisiens sur lesquels un héritage était tombé à l’improviste. Bouvard et