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que l’on puisse décerner à un savant. Il est dommage que nul ne s’en soit avisé, quand c’était par excellence, le moment d’y songer. D’autres préoccupations, il est vrai, dominaient les esprits des initiateurs de la cérémonie du 19 mai. Ils prétendaient faire remonter jusqu’à Comte le matérialisme et l’irréligion en l’honneur desquels ils s’étaient réunis. Malgré que le maître les eût conviés par exemple, à « célébrer dignement les mérites et les bienfaits du catholicisme », ils entendaient en proclamer, en son nom, la déchéance totale. Ainsi celui qui dénonça « l’absurde exagération de la supériorité propre à la raison moderne », qui se méfiait de « la vague et stérile philanthropie, trop souvent perturbatrice », et qui, surtout, proclamant la relativité de toutes choses, niait énergiquement l’absolu — devait être, étrange ironie du destin, honoré au nom de la déesse Raison par des socialistes et des jacobins. Il est possible, après tout, que le monument d’Auguste Comte devienne un lieu de pèlerinage pour les cortèges collectivistes, puisque, non loin de là, la statue du pieux Étienne Dolet reçoit, chaque année, le persévérant hommage des sociétés athéistes. À quoi tient la signification d’un monument !