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premier ministre, puis président du Sénat, nul ne devait sembler mieux préparé par tant de fonctions successives à présider à l’évolution de la politique française, de la politique intérieure tout au moins. D’autre part, le fait d’être resté pendant vingt-neuf ans à la tête d’une même cité devait parler en sa faveur. On a coutume de dire que pour conserver la confiance de ses électeurs, il suffit de ne rien faire ; mais c’est là une sottise et la plupart de ceux qui ont voulu éprouver la valeur de cette recette savent à quoi s’en tenir. La vérité est que M. Émile Loubet avait apporté à remplir ces charges si diverses des qualités qui conviennent admirablement au chef d’une République démocratique et pacifique, mais qui ne sont pas faites pour frapper l’opinion publique, encore moins pour l’enthousiasmer. Beaucoup de bon sens, une modestie éclairée, une conscience droite, un jugement sûr, de la fermeté sans entêtement, un savoir incessamment et discrètement accru, l’avaient fait estimer de tous ceux qui l’approchaient tandis que son extrême bonté lui gagnait leurs cœurs. Mais la masse des Français ne le connaissaient pas, n’ayant gardé de ses courts passages au pouvoir qu’une impression effacée.

Dès le lendemain de la mort inopinée de Félix