Page:Pierre de Coubertin - Anthologie, 1933.djvu/35

Cette page a été validée par deux contributeurs.
30
anthologie

L’heure a sonné où un tel établissement peut être utile à tous. Dans certains pays — par exemple, dans une grande partie de l’Europe continentale — on se serait trouvé jusqu’ici hors d’état d’en profiter parce que l’éducation sportive avait été trop longtemps négligée. Pour qu’un homme soit à même de faire ses « vingt-huit jours », comme on dit en France, ou de suivre son « cours de répétition », comme on dit en Suisse, il faut qu’il ait accompli, au préalable, la période réglementaire de service comme recrue et qu’il ait ainsi appris les éléments du métier militaire. De même, les « vingt-huit » ou les « treize jours » sportifs dont il est ici question, supposent une initiation antérieure qui n’a pas besoin d’avoir été très complète, mais qui doit avoir existé en quelque manière. Or, le nombre augmente — partout et rapidement — de ceux qui reçoivent cette initiation.

Ceci dit, comment se représenter l’organisation du sanatorium pour bien-portants ?… Il comprendra : un grand gymnase et des salles d’escrime et de boxe très aérées, avec en annexe, un préau couvert, des douches, un à deux salons, une salle à manger, enfin vingt à trente chambres simples et confortables. Comme nourriture : trois repas par jour avec des menus copieux à tendances végétariennes, sans exagération toutefois ; du vin de table pour ceux qui le désirent, mais aucun spiritueux. Comme genre de vie, lever à sept heures, coucher à neuf, trois heures de travail musculaire le matin et autant dans l’après-midi, une heure et demie de sieste entre deux et le reste en flânerie. C’est là, bien entendu, sinon un minimum, du moins une moyenne inférieure. Il n’y a pas lieu de prévoir de direction médicale proprement dite ; un « directeur des Exercices physiques », dont le type s’importera d’Amérique, suffira à remplir la double besogne de conseiller hygiénique et technique. Ce sera à chacun, s’il le juge nécessaire, à se faire examiner, au préalable, par son médecin habituel.

Deux points essentiels. D’abord la proscription du concours sous quelque forme que ce soit ; évidemment, on ne saurait empêcher les hôtes du sanatorium de se mesurer entre eux s’ils le veulent absolument, mais ce sera le devoir du directeur de chercher à les en détourner et de ne s’y prêter en aucune manière. L’émulation ne doit naître, ici, que de la consultation des records et, notamment, de ces « records moyens » qui indiquent les résultats auxquels peut viser selon son âge, les conditions de son organisme et la fréquence de ses exercices un homme de force moyenne. Celui qui fait un séjour au sanatorium n’a pas besoin d’être incité à l’effort musculaire puisqu’il est venu tout exprès