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une descente au monde sous-terrien

l’arrêt dans la marche et l’incarcération de Johann Wurtzler. Peut-être ignorait-il qu’il eût quitté Saardam. Chaque fois qu’on le traînait parmi ses semblables — aux heures du repas, par exemple — il y arrivait avec l’air d’un Sélénite changé de globe, et personne n’avait pu le décider encore à paraître sur le pont. La dernière bouchée au bec, suivant l’expression populaire, il filait s’enfermer avec ses chers dictionnaires, et le Pétrel aurait pu alors naviguer les mâts dans l’eau et la quille en l’air qu’il ne s’en serait probablement pas ému.

En entendant parler, cependant, du président de la République exotique, il consentit à se laisser coiffer, à se laisser enlever l’encre qu’il avait sur la figure, et à se laisser mettre une redingote. Puis, ses bons yeux toujours surpris derrière ses lunettes, il pénétra au salon, qu’il voyait pour la première fois.

Quelques instants après, le nageur mystérieux émergeait auprès des murailles du Pétrel, dont l’échelle avait été abaissée. Il y prenait pied, se baissait sur l’eau, recevait d’une personne, dont on ne vit que la main, une cassette assez volumineuse et hermétiquement close, et montait sur le pont, où Jean Kerbiquet l’accueillait et lui souhaitait la bienvenue, son équipage rangé derrière lui. En même temps, les deux canons du yacht commençaient la salve de vingt et un coups, dite d’honneur, qu’on accorde aux chefs d’États.

Le président de la République Centrale parut flatté. Il retira son masque, et répondit par des paroles cordiales au salut du jeune capitaine.

Et maintenant, tout le monde pouvait l’examiner à l’aise.