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une descente au monde sous-terrien

— Méchant capitaine ! grogna le nègre, à qui la chaleur rendait peu à peu ses facultés. Si moi là !…

Il n’acheva pas, mais son énorme patte fit le geste de broyer quelque chose.

— Tais-toi donc, Congo, lui dit son maître ; ou je te renvoie dans la voiture.

Congo frissonna et se tut. La lecture-traduction reprit :

« Mais au lieu de nous frapper, le capitaine fit tournoyer la rame et la lança dans la mer. Il eut alors un éclat de rire aigu, éleva les mains au-dessus de sa tête, et plongea. La lame qui déferlait se referma sur lui ; nous ne l’avons jamais revu.

« Les autres embarcations avalent disparu ; nous étions absolument seuls sur l’Océan démonté, dans une coquille de noix que la moindre lame pouvait retourner. Comment y sommes-nous demeurés jusqu’au matin, cramponnés, trempés, transis, c’est ce qu’il faudrait expliquer par l’intervention d’un miracle. Toujours est-il que nous nous trouvâmes saufs au jour levant, les deux dames anglaises et moi, et tout près de la côte. La tempête et les courants nous avaient poussés au sud de l’île, et nous voguions sur des eaux abritées des vents septentrionaux et relativement calmes.

« Je saisis la paire d’avirons qui nous restait, et tant bien que mal, car je suis un assez pauvre marin, Messieurs, je gagnai la terre. Nous débarquâmes sans accident, et pûmes tirer du coffre du canot les bocaux de provision qui y avaient été placés. Nous étions sauvés pour le présent. Hélas ! mes pauvres amis, nous n’étions qu’au début de nos malheurs, et nous ne pouvons pas en prévoirla fin.

« Nous sommes restés deux jours dans les rochers, vivant