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une descente au monde sous-terrien

L’ordre fut transmis, un huissier sortit, et revint bientôt conduisant un nègre de proportions colossales, pâle de froid autant que peuvent l’être les hommes de couleur, c’est-à-dire gris cendres, qui grelottait jusqu’aux moelles et claquait de ses dents de neige.

— Tu n’as pas chaud, eh ! Congo ? lui dit son capitaine. Envoie le bocal et va te fourrer dans le poêle.

Congo ne se le fit pas dire deux fois. Il ne se mit pas dans le poêle, parce que ce lui était matériellement impossible, mais si près que ce n’était vraiment pas la peine de discuter ; et il demeura complètement immobile, son torse de géant ratatiné ; s’emplissant de l’excellente chaleur qui lui faisait si cruellement défaut depuis qu’il avait mis les pieds sur le sol des Pays-Bas.

Le président avait reçu des mains de Jean Kerbiquet le document miraculeusement rencontré à la surface de la mer immense, et l’avait déployé avec précaution, l’eau salée l’ayant rendu fragile.

Une intense émotion régnait dans la salle. Les Hollandais sont longs à remuer, mais on ne peut plus les arrêter quand ils s’y mettent, et l’apparition suffisamment romanesque du jeune capitaine au long cours avait eu le pouvoir de les tirer de leur placidité normale.

Le président courut à la signature du document qu’il s’était chargé de lire, de déchiffrer, plutôt, et annonça :

— Messieurs, la communication que vient de me remettre Monsieur le marquis de Plougoven est signée Cornélius Van de Boot et datée du 5 septembre de l’année dernière.

Sensation intense dans l’assemblée.