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néphélococugie

Ains vivent à leur aize, et esventent souvent
A tous en général leurs cuisses de devant.
Si on fait cas de ceux lesquelz sont politiques,
Et qui vont se soignant des affaires publiques,
Se travaillans pour tous, veillans sur le commun,
Et jugeans droictement sur le droict de chacun :
Ainsi doibt-on priser les Cailles qui besoignent
Pour tous sans difference, et du commun se soignent,
Travaillant au commun, ont à tous l’huys ouvert,
Et d’elles en son droict tout le monde se sert.
Ainsi faisoit jadis en Egipte Rhodope,
Rhodope qui estoit la compaigne d’Esope ;
Ainsi feist Flore à Romme, en Corinthe Laïs,
Et Plangon en Milete, en Athenes Thaïs,
Et mainte autre Gregeoise en renom fortunée,
Dont a faict mention le sçavant Athenée.
Vrayment Solon estoit homme de bon esprit,
Qui dans ses belles loix ordonna par escript
Qu’entre ses citoyens les Cailles habitassent,
Et le droict d’un chacun entre elles procurassent,
Feissent droict à chacun sans personne fâcher,
Qui vers elles voudroient leur bon droict rechercher.
Elles brident le cours de la folle jeunesse,
Règlent ses passions, et luy servent d’adresse
A vivre honnestement et à mettre en prison
Ses propres appetitz domtez de la raison,
A ne fascher autruy cherchant son vitupere,
Et tâchant de soüiller sa femme d’adultère,
A despouiller ses meurs pleines de cruauté,
Et avoir en leur lieu toute civilité.
Cependant qu’une Alix, Caille à nulle seconde,
Procuroit dans Paris les affaires du monde,
La ville n’estoit pas si pleine de cornus,
De cornes, de cornardz, grandz, petitz et menus :
Car cette bonne Caille, en son mestier experte,
Avoit à tous venans une maison ouverte,