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néphélococugie

Adorez leurs grandeurs, et par veuz solennelz
Presentez-leur vos dons comme aux Dieux eternelz :
Ilz sont plus anciens que la mer, que la terre,
Que l’air, et que le ciel qui tout couvre et enserre,
Devant le viel Chaos, l’Erebe, et les Enfers,
Qui feurent embrouillez parmy tout l’univers,
Devant Saturne aussi dont la belle semence
A produit tous les Dieux autheurs de vostre essence ;
Ilz estoient desjà faictz et voletoient aussi,
Par les brouillardz espais du Chaos obscurcy.
L’Amour et les Cocus nasquirent à mesme heure,
Et pour le vous monstrer par une preuve seure,
Ce Dieu s’accoste d’eux, et voulant les hausser,
Partout où il les void, il les va caresser,
Les va couvrant de poil, embellist leur plumaige,
Et n’ayme jamais rien sinon leur cocuaige :
Quand ilz volent par l’air, il s’envole avec eux,
S’ilz ne bougent du nid, il languist paresseux,
Leur ennuy c’est le sien, et leur jeu delectable
N’est autre que son jeu plaisant et agréable :
Si doncques cest archer de voz ames vainqueur,
Une beauté mortelle a mise en vostre cœur,
Et si vous endurez dedans vostre moüelle
Les effets violens de sa flamme cruelle :
Ne pensez le flechir, luy qui est indompté,
Pour adresser voz veux à sa divinité,
Ne plorez, ne plaignez ses assaux, ses alarmes,
Il se rit de voz pleurs, il se paist de voz larmes,
Et plus est enflammé quand il vous void pleurer
Les tourmens, les ennuys qu’il vous faict endurer.
Adressez aux Cocus voz dévotes prieres,
Qui play’ront Cupidon et voz maistresses fieres,
Et vous feront cesser voz plaintes, voz douleurs,
Vos flammes, voz soucys, voz larmes et voz pleurs.
Ce Dieu qui d’un seul clin de sa teste divine
Esbranle le pourpris de la ronde machine,