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la comédie

Jamais Ceres n’envoyra la famine,
Et bref au ciel la grand troupe divine
Vous portera tel respect et honneur
Que le subject porte à son vrai seigneur.
Si les mortelz, par annuel office,
Vont immolant aux Dieux un sacrifice,
A Jupiter un beau belier cornu,
Et un taureau à Neptune chenu,
Un gras pourceau à Venus qui preside
En Amathuse, en Eryce et en Cnide :
Au filz d’Alcmene un beuf sorty du joug
Qui vit aux prez, et à Bacchus un bouc,
Et un sanglier à Ceres la divine,
Et une cerve à la blanche Dictynne,
Au Dieu Phœbus un cheval courageux,
Et à Priape un asne paresseux,
Vous en prendrez le meilleur, et le reste
Qui ne vault rien, qu’on jette et qu’on deteste
Comme un cheval et un asne couillard,
Vous l’envoierez aux grandz Dieux pour leur part,
Qui en feront une metarmophose
En des perdrix, ou en quelque autre chose
Qu’ilz aymeront, car je ne connoys pas
Quelz metz ilz ont là haut en leur repas.

Cornard

O que les Dieux auront de mal extresme,
Je prevoy bien desjà dedans moy-mesme
Qu’ilz ne pourront à la longue durer
Qu’une grand’faim ne les vienne serrer.

Chœur

Puisque les Dieux craignans nostre puissance
Seront contraintz nous faire obéissance,
Et que vivrons de metz plus precieux,
Que reste-t-il que nous ne soyons Dieux ?