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la comédie

Genin

Si vous eussiez tousjours esté en bande,
L’homme mutin qui rien plus ne demande
Que changement de Prince, et de Seigneur,
Vous eust porté malgré luy tout honneur,
Espris de peur que se jettant aux armes
Il n’eust soudain en teste voz gendarmes,
Qui repoussans promptement son effort
L’eussent puny d’une cruelle mort :
Mais vous voyant courir à la volée,
Sa froide peur s’est de luy escoulée,
Et n’a point craint de vous chasser du lieu
Où vous estiez honorez comme un Dieu.
Et maintenant il cherche vos dommages,
Il vous mesprise, et vous pense volages,
Et qui plus est, sans pitié ny esgard,
Il vous meurtrist, il vous larde de lard,
Vous faict rostir, et pour metz delectable
Il vous appose, et vous mange à sa table.
Si doncques l’homme est vers vous si mechant,
Pensez comment Priape ira taschant
De vous vexer, de vous estre moleste,
Puisqu’il vous est ennemy manifeste.
Hardy sur vous il se viendra jetter,
Et vous pourra aizement surmonter,
Ainsi espars : comme un lyon se ruë
Sur un taureau qu’il deschire et qu’il tuë,
En le voyant dessuz le bord d’un pré,
De son troupeau à l’escart séparé :
Ny plus ny moins vous voyant eu desordre,
Voletans seulz, sans arrest et sans ordre,
Vostre ennemy peut bien à son plaisir,
De vostre bois, et de vous se saisir.