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la comédie

De faire l’or, et l’affiner si bien,
Qu’il passe au change, et qu’on n’y connoist rien,
Soit qu’on le touche, ou bien qu’on le martelle,
Qu’il soit au feu où souffre la coupelle :
Et ce qui est non moins rare et hautain,
Je puis aussi d’un changement certain
Fondre en argent ce qui estoit nagueres
Un vil metal et ne valoit pas gueres.

Genin

De quelz moyens use-tu en cecy ?

L’Alchemiste

Je ne veux pas rendre profane ainsi
Mon art sacré, qui ne se manifeste
Qu’à ceux qui ont l'ame toute celeste,
Qui ne sont point brouillez de passions,
D’humains desirs de perturbations,
Ains affranchis de ce que l’homme endure,
Cherchent hardis les secretz de nature,
Et les vertus infuses aux metaux,
Les mixtions de tous les minéraux,
Et comme ilz sont connuz en leur miniere,
Quelle est leur force et leur cause premiere,
Et s’ilz se vont corrompant par le cours
Du temps qui coulle, ou s’ilz durent tousjours,
Quelle est leur mort, et quelle est leur naissance,
Leur nourriture, et leur belle accroissance :
Quelle chaleur forte temperamment
Les entretient et leur donne aliment :
Comme le plomb en l’argent se transforme,
Et comme l’or ne change point sa forme,
L’argent la change, et le plomb et l’estain,
Et l’argent vif, et le cuivre et l’airain,
Ainsi soigneux de comprendre ces choses
Qui dans le sein de la terre sont closes,