Page:Pierre Duhem - Les Origines de la statique, tome premier, 1905.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 56 —

montée ; et s’il descend plus, il faut que le bras de la balance qui descend avec lui soit plus long que l’autre. Et si tu voulais que le petit poids f levât le grand e, il faudrait que le poids f se mût sur une plus grande longueur et plus rapidement que le poids e. » C’est l’excès seul de la puissance du moteur sur la résistance du mobile qui détermine le mouvement ; plus cet excès est grand, plus le mouvement est vif. « Aucune puissance[1] ne prévaut sur sa résistance, sinon avec la partie de laquelle elle excède cette résistance. Ou bien : aucun moteur ne prévaut sur son mobile, sinon par ce dont il excède ce mobile... Et d’autant plus que le mouvement du mobile est joint à l’impeto, et d’autant plus qu’est grand l’impeto de ce mobile, qui peut croître à l’infini. » Si une poulie porte deux poids égaux, ces poids demeureront immobiles ; s’ils sont inégaux, le plus lourd descendra avec une vitesse proportionnelle à son excès sur le plus léger : « Si une livre de poids tombe contre une livre de résistance[2], elle ne changera pas de place ; elle restera de même. Et si par dessus se trouve attachée une autre livre, elle descendra à terre en une certaine quantité de temps ; si tu y ajoutes encore une autre livre, tout le poids descendra avec une vitesse doublée. »

Donc l’horloge qui se remonterait elle-même est une chimère ; toujours le poids qui possède la plus grande puissance motrice se mettra à descendre et, quand il sera parvenu au bas de sa course, l’horloge s’arrêtera ; de là, cette conclusion[3] de Léonard :

« Contre le mouvement perpétuel. Aucune chose insensible ne pourra se mouvoir par elle-même ; par conséquent, si elle se meut, elle est mue par une puissance

  1. Les Manuscrits de Léonard de Vinci, publiés par Ch. Ravaisson-Mollien ; Ms. E de la Bibliothèque de l’Institut, fol. 21, recto, Paris, 1888.
  2. Les Manuscrits de Léonard de Vinci, publiés par Ch. Ravaisson-Mollien ; Ms. A de la Bibliothèque de l’Institut, fol. 22, verso, Paris, 1881.
  3. Les Manuscrits de Léonard de Vinci, publiés par Ch. Ravaisson-Mollien ; Ms. A de la Bibliothèque de l’Institut, fol. 22, verso, Paris, 1881.