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CHAPITRE IV

L’IMPOSSIBILITÉ DU MOUVEMENT PERPÉTUEL

On rangerait plus volontiers la question du mouvement perpétuel en Dynamique qu’en Statique ; mais, pour Léonard de Vinci et pour Cardan, non plus que pour Aristote, il n’existe entre ces deux sciences aucune infranchissable barrière. D’autre part, l’impossibilité du mouvement perpétuel a été admise, par Galilée et par Stevin, comme un axiome propre à fonder certaines démonstrations de Statique ; et Galilée et Stevin avaient lu les écrits de Cardan, où ils avaient peut-être puisé leur confiance en cet axiome ; et Cardan, écrivant contre le mouvement perpétuel, n’avait fait que résumer les notes éparses de Léonard de Vinci. Nous ne saurions donc nous faire une idée nette et complète des origines de la Statique si nous ne passions en revue les objections que Léonard de Vinci et Cardan ont opposées au perpetuum mobile.

La recherche du mouvement perpétuel est le nom générique par lequel on désigne deux utopies distinctes, la recherche du perpétuel moteur et la recherche du perpétuel mobile.

La plus grossière de ces utopies, la recherche du perpétuel moteur, est l’erreur du meunier qui, dans son réservoir, détient une masse d’eau déterminée, prête à tomber d’une hauteur déterminée et qui voudrait sans ajouter une pinte à cette eau, sans ajouter un pouce à la hauteur de son réservoir, combiner des engrenages merveilleux qui lui permettraient de moudre autant de grain qu’il lui plairait.

Nous avons vu avec quelle précision le grand hydraulicien qu’est Léonard ramène à leur juste mesure les ambitions de notre meunier. Qu’il mette sur sa roue cent