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Reçois donc mes conseils en faveur de toi-même.
Et pour ton intérêt aime celui qui t’aime.

DAPHNÉ.

Termine ce discours que j’entends chaque jour,
Tu perds contre un Rocher les flèches de l’amour,
Appelle-moi cruelle, appelle-moi sauvage,
J’endurerai ces noms plutôt que son servage ;
Souffre enfin que mon cœur hors de captivité
Ne reçoive des lois que de ma volonté.

NERINE.

Crois-moi, belle Daphné, sers-toi de ta jeunesse,
Et n’attends pas enfin que ta grâce te laisse,
Les beautés sont des biens qui ne se gardent pas,
Et le temps, qui les fait, efface leurs appas ;
Si l’on peut condamner l’avare qui possède
Autant d’or qu’il en veut, et jamais ne s’en aide,
Ne te pourra-t-on pas justement accuser
D’avoir cette jeunesse, et de n’en pas user ?
Durant l’aimable temps que la jeunesse dure
C’est un rare dépôt qu’on a de la Nature,
C’est un rare trésor dont il se faut servir
Devant qu’un nombre d’ans nous le vienne ravir.