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NERINE.

J’approuve en quelque sorte un dessein si barbare
Puisqu’il nous a fait voir une action si rare,
Mais qui croirait Daphné qu’un grand étonnement
Pût laisser à l’esprit un si clair jugement ?

DAPHNÉ.

Le désir violent de sauver ce qu’on aime
Peut plus dessus l’esprit que l’épouvante même.
Mais pour apprendre tout, écoute mon discours,
Et vois comme les Dieux nous prêtent leur secours.
Avant que te trouver auprès de ce bocage
J’ai suivi trois soldats qui tenaient ce langage,
Je ne la connais point, mais il faut l’assister,
L’espérance du gain nous y doit inviter.
Or te voyant surpris par cette troupe infâme
Ce que j’avais ouï s’est remis dans mon âme.
Si bien qu’ayant jugé qu’ils employaient leurs bras
Au secours de quelqu’un qu’ils ne connaissaient pas,
J’ai feint ce qu’on a vu, quelque Dieu m’a guidée,
Et pour te délivrer les traîtres m’ont aidée,
On voit dans les dangers l’esprit industrieux,
Et la nécessité le rend ingénieux.