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PAR LES FEMMES.

tandis qu’elle, Emma, toujours trop bonne fille, était et ne serait jamais qu’une pauvre créature, parce qu’elle avait le cœur sur la main.

— Voilà la vie, mon vieux. Tu es encore un peu jeune pour la connaître et la comprendre, mais tu verras plus tard. J’ai ma petite expérience : il n’y a que les gens rosses qui réussissent. Quoi ! Je ne suis ni plus bête, ni plus mal tournée qu’une autre. Moi aussi j’aurais des rivières de diamants, des chevaux, des voitures, un hôtel. Mais qu’est-ce que tu veux ! Toute grue que je suis, j’ai ma dignité et j’entends conserver ma liberté. Un type qui me déplaît, m’offrirait-il cent mille francs, à moi qui bien souvent n’ai pas une croûte à me mettre sous la dent, je lui rirais au nez et lui dirais d’aller porter son argent ailleurs. M’arrive-t-il de tomber sur un garçon comme toi, qui n’a pas le sou, mais qui me chausse, pan, ça y est ! tu sais ce qui arrive. Eh bien ! si tu veux t’en rapporter à la petite Emma qui, somme toute, est une bonne fille — il y a de braves gens dans tous les métiers — et qui a encore un grain de bon sens, c’est pas comme ça qu’on arrive à Paris, mon vieux !