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PAR LES FEMMES.

dait lui parler ; et puis c’étaient tous les moindres détails de la soirée qu’il avait passée avec elle : la maison qu’elle habitait, un hôtel garni ; l’escalier qu’il lui avait fallu gravir, mal éclairé par une grosse lanterne qui jetait sur les marches de bois cirées et sur les murs blanchis un éclat sinistre ; la chambre d’Emma, au mobilier disparate, composé de fauteuils de velours grenat usés, mais qui jadis avaient dû faire bonne figure dans quelque somptueux salon, de chaises de paille et de bibelots japonais, de ces bibelots clinquants, à bon marché ; la fille enfin se déshabillant rapidement devant lui, sans pudeur, sans grâce, jetant, pêle-mêle, son jupon, son corset, lui entourant le cou de ses bras, l’entrainant vers le lit, dont le sommier gémissait, lui dévoilant tout d’un coup les mystères de l’amour — quel amour ! — En quelques heures, elle lui avait révélé tous les artifices de cet amour compliqué et vicieux des filles débauchées, et lui, dont l’éducation sensuelle n’était pas encore faite et qui demandait à être initié petit à petit, au lieu d’ivresse, il n’avait éprouvé que du dégoût.

« Est-ce donc cela la femme ? s’était-il demandé. Non, ce n’est là qu’une fille ! »