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PAR LES FEMMES.

et de crainte qu’il avait alternativement ressenties dans cette boîte roulante. Que c’était loin déjà ! Aujourd’hui il avait à son côté l’une des femmes les plus jolies, l’une des courtisanes les plus brillantes et les plus célèbres de Paris. Ce n’était plus le petit provincial craintif, abandonné : c’était un parisien.

Il lui semblait maintenant qu’il connaissait tout, que le monde pour lui n’avait plus de secrets et un frisson d’orgueil glissait sur toute sa chair. Oh ! que n’aurait-il pas donné pour qu’on pût le voir, dans cette voiture, reconduisant chez elle Marguerite Alcinde.

Il fut brusquement tiré de ses réflexions : quelque chose venait dans l’obscurité de frôler sa main. Machinalement, il la retira. Mais ayant de nouveau senti un léger frôlement, il surprit la main d’Alcinde délicatement posée sur la sienne. Un cahot de la voiture les fit se séparer. Bientôt cependant, la petite main, dégantée maintenant, revenait à la charge, audacieuse et habile. Alors, étonné, Jacques regarda la jeune femme : elle était blottie dans un coin de la voilure, le visage enfoui dans les fourrures : de temps à autre, au passage d’un réverbère, il l’apercevait qui souriait, les yeux luisants.