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LE CRIME DE DIEU

Or, il était un temps où rien n’était que l’Être.
Seul parmi le néant qui ne peut rien connaître,
Il songeait. Il songeait qu’il était Dieu, mais seul,
Enveloppé de vide ainsi que d’un linceul.

Un jour vint donc, fatal, où l’Auteur de soi-même
Sentit, qui le gagnait, une tristesse extrême.
Il bâilla. Et ses yeux fouillant l’énorme nuit
N’y trouvèrent partout que le noir et l’ennui.

À quoi bon être Tout, à quoi bon être Maître,
Si l’on n’exerce pas son pouvoir sur des êtres !
À quoi bon être seul, sans bornes et parfait,
À quoi bon être Dieu si nul ne sait qu’on l’est.