Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/86

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui l’ont jaulne. Touts oyseaux couvent leurs œufs quasi en mesme maniere, & font esclorre leurs petits de leur chaleur naturelle. Mais il y ha difference en ce que touts masles ne sont si soigneux d’ayder la femelle les uns, comme les autres. Aussi il y en ha quelques uns, qui ne s’en soucient point du tout. Et comme avons dit, entant que l’origine du petit est de prendre corps de l’aubin, & se nourrir du moyeu en la coque, ne voulons entendre, qu’il le mange leans avecques le bec : car nature estant courtoyse le luy envoye par le nombril, tout ainsi comme elle fait es petits des animaux terrestres, lors qu’ils sont es ventres de leurs meres. Et comme les animaux terrestres portent en leur ventre, les uns plus long temps que les autres, tout ainsi y ha des oyseaux qui ont plus tost couvé, & esclos leurs petits, les autres plus tard. Car ceux de plus grosse corpulence ont affaire de plus long temps que les petits. Au commencement que lon essaye à discerner le petit nouvellement formé en l’œuf, lon voit sa teste, & ses yeulx assez gros, aussi ne luy peut on rien discerner autre chose des autres membres que cela, principalement avant le dixiesme jour. Car puis apres toutes ses parties sont manifestes, comme aussi les entrailles, & autres parties interieures. Le vingtiesme jour d’apres il commence à se couvrir de plume, auquel temps si on luy rompt la coque, on le voirra remuër leans, & luy oirra lon faire commencement de son cry, qui est nommé en Latin Pipire, qu’on ne peut exprimer de nom Françoys : & de lá en avant le petit drugera de plus en plus, se couvrant de plumes, & beaucoup plus tost, s’il est arrousé d’eau de pluye. Qui trancheroit le petit dix jours apres qu’il est esclos, on luy trouveroit encor de l’humeur du moyeu de reste dans son ventre. Cela peut on plus facilement appercevoir es gros oyseaux, car les petits sont trop difficiles à voir, sçachant que leur grande exiguïté, rend les parties cachees. Encor dure une opinion entre les paisants de nostre temps, conforme à celle du temps d’Aristote, que les oyseaux qui font beaucoup de petits, ne nourrissent le dernier esclos. Et de nom Françoys l’ont voulu appeller le Closcuau. Cela est ce que Pline dit en l’unziesme livre de l’hystoire naturelle, chapitre quarenteneufiesme, en ceste maniere : Pomilionum genus (dit il) in omnibus animalibus est, atque etiam inter volucres. Mais tout ainsi que ce qu’il ha de bon est prins de divers autheurs, tout ainsi ha il prins ce passage d’Aristote au douziesme chapitre du livre huictiesme de la nature des animaux, ou il parle des Gruës, quand il dit : Grues quae ex Scythicis campis ad paludes Aegypto superiorres, unde Nilus profluit, veniunt. Quo in loco pugnare cum Pygmaeis dicuntur : Non enim id fabula est, sed certe genus tum hominum, tum etiam equorum pusillum (ut dicitur) est. Sur ce point Pline au dixiesme livre, chapitre cinquantesixiesme, dit en ceste maniere. Est & pumilionum genus non sterile in iis, quod non in alio genere alitum, sed quibus certe foecunditas rara, & incubatio ovis noxia. Ayants donc assez escrit des oyseaux en termes generaux, & de leurs differences, fault maintenant que commencions les specifier en particulier, suyvant l’ordre des six distinctions, que nous avons ja entreprinses. Parquoy apres avoir fait un discours sur les facultez prinses des aliments des oyseaux, nous commencerons par les oyseaux de rapine.