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sorte en lumiere. Mais pource que ce mystere se peut mieux comprendre es petits qui sont encor dedens les œufs au temps qu’ils sont prests à esclorre, nous en dirons d’avantage en ce suyvant chapitre.

De la nature des œufs.
CHAP. IX.


LES modernes escrivants de la nature, forme, & constitution des choses naturelles, doivent considerer s’ils en trouvent aucune enseigne es escripts des anciens, à fin que par eux ce qu’ils en dient, soit confirmé : & en ce faisant ne se desdaigner descrire chasque chose par le menu. A peine pouvons dire chose, qui n’ait esté des-ja sceuë. Dont possible qu’il semblera par trop puërile, à quelques uns si leur disons que les Françoys mangeants les œufs en coque, les entament par la poincte delice, & puis ayants vuidé la coque la remettent dans le plat sans la rompre, & que les Almants les ouvrent par le costé, & puis quand ils les ont mangez ont coustume d’en rompre la coque. Mais voyez que ceste chose ha esté anciennement disputee, & dont quelques philosophes ont essayé donner la raison. Pline ha escrit au second chapitre du vingt & huictiesme livre en ceste maniere : Defigi quidem diris depracationibus nemo non metuit. Huc pertinet uvorum, ut exorbuerit quisque, calyces cochle arumque protinus frangi, aut eosdem cochlearibus perforari. Voulant dire, qu’anciennement apres qu’ils avoyent mangé les œufs, c’estoit mauvais augure de remettre les coques au plat sans les rompre. Il advient aucunesfois que quelques oyseaux ponnent sans avoir esté couverts des masles, mais (comme dirons par cy apres) leurs œufs ne valent rien à couver. Ja avons dict que tous animaux ne sont si parfaicts les uns comme les autres, & mesmement entre les oyseaux, lon en trouve qui ne ponnent aucuns œufs. La frequente diffection des animaux nous peut donner à cognoistrer, que les femelles de ceux qui rendent le petit en vie, peuvent estre emplies de la seule semence des masles, moyennant les purgations precedentes : qui est chose conforme à ce qu’avons dit, parlants des oyseaux steriles, & seconds. La semence humorale des femelles tant des oyseaux, que des autres animaux qui rendent le petit en vie, passe par certains conduicts, sans entrer dedens la cavité de la matrice : toutesfois que ne voulons nous eslongner de l’opinion de ceux qui en avoyent dict autrement sans en avoir veu l’experience : car tout ainsi qu’on cognoist que c’est chose inique de s’adjoindre à l’opinion contraire de son precepteur, sans en avoir cogneu le contraire : aussi est encor plus inique, maintenir la mensonge si lon en ha cogneu le contraire : car c’est le devoir de l’homme, ne dissimuler la verité, & ne dire rien oultre sa pensee. Celuy qui ha aperceu en diverses especes d’animaux pregnants, que leur vapeur est envoyee par canaux bien prés du conduit interieur, ha cognu qu’elle vient à sortir en icelle cavité qui reçoit le genital du masle, entre la bouche honteuse & celle de la matrice. Ceci est aussi escrit en l’anatomie interieure du Dauphin au livre des estranges poyssons marins. Si donc l’humeur de semence des femelles, sortant hors avoit à passer par le dedens de la matrice, comme plusieurs ont pensé, il fauldroit imaginer