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luy doive sembler de plus grande admiration, que d’imaginer la vertu d’une petite semence, dont est puis engendré un arbre si hault eslevé en l’aer ? & qu’en une si petite portion de matiere issuë des entrailles d’un animal, se doive engendrer une si grosse masse de chair ? & que d’un si petit œuf doive naistre un si grand oyseau ? Dira l’on pas que c’est pas rencontre de quelque matiere en une autre qui avoit tel douaïre en sa puissance ? Cecy n’est il pas digne de grande contemplation, & d’un homme speculatif ? Parquoy les generations de toutes choses, qui ont commencement, & fin en l’estre de nature, sont en telle consideration, qu’elles se rendent faciles à celuy qui veult travailler à les apprendre. Et pour faire meilleure comparaison des conceptions, & commencement des generations des oyseaux, avec les animaux qui rendent les petits en vie, n’avons voulu laisser en arriere sans toucher quelque petit mot de certains animaux aellez, tels que sont les Papillons, & plusieurs autres especes d’Insectes, qui sont engendrez des œufs. Mais en oultre pource que touts animaux tant aellez, terrestres, que aquatiques ont quelques enseignes en leurs anatomies & natures, qui peuvent convenir avec celle des plantes, ou au moins en approcher de bien pres, si que comme telles fois les plantes sont eslevees des semences que les autres herbes ont produict, les autres sont engendrees du bon gré de nature, & attirent leur nourriture les unes de la terre, & les autres sont trouvees s’engendrer, & vivre avec autruy, ainsi que fait le Guy, & Lycion : tout ainsi quelques animaux naissent les uns des autres, les uns par semence, les autres de quelque putrefaction tant de terre & des plantes, que de quelque partie corrompue en autre animal, comme advient de diverses especes de petites vermines qui sont nommez Insectes. Quant aux oyseaux, serpents, & bestes à quatre piedz, & quasi toutes especes de poissons, il n’y en ha aucun qui ne soit engendré par la meslange du masle, & de la femelle. Soit que quelques animaux s’engendrent de pourriture, comme sont les verms du ventre, ou la vermine du bestial : toutesfois lon trouve evidente distinction en plusieurs especes d’iceux, du masle & de la femelle, tellement que s’acouplants ensemble, peuvent engendrer quelque chose : mais de laquelle, il ne peut plus estre rien engendré. Cecy appert par l’exemple des Poux, & Pulces qui engendrent les lendes, & les Mouches engendrent de moult petits verms, & les longues Teignes du ventre nommez Ascarides, engendrent quelques autres vermines, qui sont semblables à la semence d’un concombre. Lon en cognoist aussi d’autres, qui sont seulement engendrez de putrefaction, & vivent sans avoir distinction de masle & femelle : & parce ne peuvent rien engendrer : comme sont les Cirons des mains. Toutes especes de Papillons & autres tels animaux aellez engendrent des Chenilles, qui aussi ont prins naissance de l’œuf. Toutes especes de Papillons se transforment en plus de six figures en moins de demie annee : desquels pour en bailler l’exemple, avons mis les verms qui nous filent la soye, que les Grecs & Latins nomment Bombyces, & les Italiens Cavalieri : desquels comme il fault garder les œufs depuis l’autonne jusques en hyver, tout ainsi toutes manieres de Papillons que nous voyons voler le long de l’esté, ponnent leurs œufs en diverses manieres, qui toutesfois sçavent bien faire qu’ils n’en perdent pas un, & desquels les uns les mettent contre quelque tronc d’arbre, les autres dedens terre, les autres contre quelque rameau : desquels œufs s’engendrent quelques petits verms, qui ne l’espace de trois jours deviennent totalement en Chenilles,