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soit vray,la science de maintenir l’animal en santé, & le sçavoir garder d’estre malade, encor que cela se refere à la vie, & discourir sur la cause & accident de son mal quand il y est tumbé, & avoir cognoissance de la maladie par l’observation du present, & par presage de l’advenir, ou par la souvenance du passé, ou estre expert en la guerison des corps par l’exterieur ou par l’interieur, ne depend elle pas de Physiologie ? Or si nous la voulons definir, nous ne dirons pas que c’est une partie de medecine, par laquelle lon dispute particulierement de la nature de l’homme, mais dirons que c’est une partie de Philosophie moult universelle, par laquelle lon peut estre enseigné que c’est de la nature & constitution des corps des animaux. Car l’homme n’estant qu’une espece, ne doit estre prins que pour un particulier. Puis donc que touts animaux de quelque qualité qu’ils soyent, ont leurs actions differentes pour se maintenir en nature, il fault conceder que leurs substances sont participantes chascune en son endroit, de la perfection des complexions des premiers elemens, feu, eau, aer, terre : & sont temperez de chaleur, froideur, humidité, & siccité, qui sont proportionez en la disposition de leurs matieres & substances, ayans telles humeurs qu’il a fallu pour leurs membres. Car aux animaux qui n’ont point de sang, nature bailla humeurs proportionnez en puissance à ceux des animaux sanguins, choleriques, phlegmetiques, & melancholiques, tant pour l’acompagnement des membres principaux munis d’os, cartilages, muscles, nerfs, venes, arteres, charnure, & gresse, que des autres parties principales donnees aux animaux pour leurs mouvements soubdains ou tardifs, & avoir facultez, c’est à dire puissance en leurs actions, dont procedent leurs sens, & esprits. Car de leur cerveau ou chose correspondante vient le commencement & origine des nerfs. Ils ont eu le sentiment du toucher sans avoir certain endroit deputé : qui est chose commune à touts animaux : & ont la veuë mise aux yeux, l’ouye es temples, l’odeur, & l’election des saveurs en la langue, & narines : comme aussi pour estre en vie, ont les arteres respondentes au cœur : & pour prendre nourriture, les venes provenantes du foye, ou chose correspondente à cela. Si donc les corps des animaux sont maintenus en vigueur par les choses susdictes, qui sont toutes naturelles, il a esté necessaire pour l’entretenement d’icelles user encor d’autres choses non naturelles, toutes exterieures, qui les peuvent conserver jusques au juste cours de leur aage, ou les corrompre avant leur temps, selon qu’elles leur sont appliquees à propos ou au contraire. Pour l’un j’entens de l’aer inuisible ou propice : l’autre du boire & manger en qualité & quantité : puis le dormir, ou veiller ou de jour, ou de nuict : finalement du repos, & travail violent, ou foible : comme aussi de divers accidents, qui peuvent leur esmouvoir le’sprit. Or donc si le Philosophe ne s’estoit proposé contempler que la seule fabrique de l’homme & ame d’iceluy, pour acquerir l’intelligence des susdictes considerations, auroit il si grande occasion d’annoncer la puissance infinie de nostre Dieu immortel ? Quel moyen trouveroit-il pour prouver l’immortalité de noz ames ? Parquoy il n’y a rien plus beau en l’homme, de quelque qualité qu’il soit, ne qui le rende plus digne ou plus honneste & aggreable à son Dieu, & luy face mieulx cognoistre la grandeur de ses œuvres, que l’eslever son esprit en la contemplation des matieres, formes, & actions des animaux, & des plantes. C’est le commencement par lequel les Philosophes sont parvenus à la cognoissance des substances superieures des corps celestes & autres telles choses, qu’on