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mesmement qu’il est necessaire en touts les ouvrages humains & naturels, que l’ordre y soit gardé. Et qu’il soit vray, ne fault il pas que la terre, les cieulx, & tout le firmament soyent deuëment ordonnez pour l’action de ce qu’ils ont a servir. Car s’il en estoit autrement, toutes choses seroyent en confussion. Pour l’ordre, soit entendu quand les choses tant artificielles que naturelles, montent ou descendent chascune par son degré. Par ainsi il est à sçavoir que il y a deux manieres d’ordre : l’un venant du haut en bas, qui est celuy que les anciens Philosophes nomment l’ordre resolutif, qui est interpreté en françoys desjoignant d’ensemble. L’autre ordre est montant du bas en haut, nommé en Latin Compositif, c’est à dire qui conjoinct & assemble. Et pour en donner exemple, mettons les quatre saisons de l’annee en comparaison à l’ouvrage d’un homme. Car comme les cieux ont leurs degrez pour passer d’une saison en l’autre, commençants par l’inferieur & montants jusques à ce qu’ils soyent parvenuz au plus hault pour redescendre, tout ainsi les hommes en toutes leurs operations tant de l’esprit que du corps, se tiennent en l’ordre compositif, pour monter de bas en hault pour conjoindre & assembler leur ouvrage en un corps : ou bien à l’ordre resolutif, descendant du haut en bas, pour separer & deffaire les pieces d’ensemble, & en faire diverses parties. Nous voyons que un Roy, Empereur, ou autre prince s’aidant de l’ordre compositif, assemble telle armee de galeres, navires, & vaisseaux de mer, en un corps, comme ses forces ou son affaire le requierent : & tel camp par terre, comme il fault avoir des bendes d’hommes, lequel puis il despece & separe jusques à une personne par l’ordre resolutif. Tout ainsi un Philosophe considerant la nature du corps d’un animal par l’ordre compositif, le trouve ja en son estre & matiere, tout composé des choses naturelles, c’est asçavoir elements, temperaments, humeurs, parties corporelles, facultez, actions, & esprits. Mais s’il le considere par l’ordre resolutif, il le despece & separe, pensant chasque petite partie à part soy, ainsi comme pourroit faire un charpentier despeçant une maison, quand il met les tuilles, lates, limandes, chevrons, pierres, & chaulx chascune à part soy. Aussi un Philosophe qui entreprendroit separer toutes les parties d’un oyseau, & les vouldroit considerer par le menu, commenceroit par ce qu’il trouve plus particulier en un chascun, comme par une plume, par un bec, un ongle, par la teste, col, aelles, cuisses, jambes, pieds, & ainsi des autres : car peau, chair, os, & telles autres choses, sont communes a touts autres animaux. Tout ainsi nous, desirants observer un ordre en cest ouvrage, prendrons la premiere difference des oyseaux de ceux qui vivent de rapine, commençants par les especes des Aigles, des Vaultours, des oyseaux de proye nommez en Latin Accipitres, des Milans, & leurs semblables. Ceux en c’est ordre dont baillerons les pourtraicts, & que descrirons par propres noms Françoys, sont le Vaultour noir & fauve, l’Aigle noire & fauve, le Gerfaut, l’Autour, le Sacre cogneu & aussi l’Egyptien, le Faucon, l’Espervier, le Mouchet, l’Esmerillon, le Hobreau, le Lanier, le Tiercelet, l’Offraye, la Cresserelle, la Buze, la Boudre, le Goyran, le Faux perdrieux, l’oyseau nommé Jan le blanc, les Pies griesches tant grande que petite. Et pour la similitude y adjousteray le Coqu, & y comprendray touts les oyseaux de nuict, nommez en Latin Nocturnae aves, entre lesquels celuy qu’on nomme l’Effraye la Hulote, la Chevache, le grand & petit Duc, le Hibou ou Chahuant, & l’Ossifragus, le Charadrias, le Corbeau de nuict, & le Faucon de nuict, y seront nombrez. Apres