Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/333

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui sont dessous le ventre, & dessus le cropion sont encor plus jaulnes, tirants sur le paillé. Le Pic verd ha cela de particuliër, que sa queuë & ses pieds sont faits d’une autre sorte que les pieds des autres oyseaux : car en tant qu’il est oyseau prenant sa pasture des excrements des arbres, & vermines d’iceux, nature luy ha baillé les ongles moult voultez, & bien crochuz pour se tenir tant à la renverse, comme pour grimper en montant, & descendre le long des troncs & rameaux. Il ha deux doigts devant, & deux derriere : mais celuy en chasque pied qui est baillé pour l’ergot, est plus long que les autres. Sa queuë est moult propice pour sa façon de vivre : car son extremité est ronde, & les plumes moult rudes, dont il se sert rampant sur les arbres, s’appuyant à elle pour se servir de contrepoix : & au lieu ou quasi touts autres oyseaux y ont douze plumes, le Pic verd n’en ha que dix. Il ha l’aelle bigarree par dessous, comme sont celles d’un oyseau de proye : sçavoir est, de taches blanches dessus les plumes brunes. L’un des doigts de ses pieds est presque aussi long comme sa jambe, qui est noire. Ses yeux ne sont gueres grands. Sa langue est longue, & ronde, comme est celle d’un Chameleon, & qui ressemble à une Achee, autrement nomme un Verm de te terre. Encor que le Pic verd soit de grande corpulence, toutesfois il n’est vendu avec les autres oyseaux delicats par les marchez des villes, d’autant qu’il est estimé de charnure durette. Il est bien vray, que les paisans luy ayants osté la teste, & lardé, ne laissent à le manger, tant rosty que bouïlly. Entre les autres enseignes qu’on luy ha specialement attribuës, c’est qu’il ha peine à se tenir sur les pieds contre terre. Touts Pics verds & autres oyseaux, qui montent sur les arbres, ont les jambes courtes, mais les pieds sont assez grands. Aristote ha dit que le petit, qui est particuliërement nommé Epeiche, & en Grec Pipra, est en dissension avec le grand Pic mart, qu’il nomme proprement Latea, comme qui diroit en Françoys, le Pic rouge, & le jaulne ont haine ensemble, & parce il fait violence aux œufs, & aux petits de l’Aigrette. La Turtrelle ha aussi inimitié avec le Pic jaulne : mais estant superieur, & le plus fort, il la tue. Aussi dit Pline au dixiesme livre, chap. septente-quatriesme, que Chloreus, qu’interpretons le Pic jaulne, & le Corbeau se combatent de nuict, cherchants les œufs l’un de l’autre.

Du Pic verd rouge, nommé en Françoys une Epeiche.
CHAP. XIIII.


L’OYSEAU que nous nommons une Epeiche est aussi du genre des Pics vers. Les Latins dient Pipo, & les Grecs Pipra. Aristote l’ha nombrée pour la premiëre espece, en commençant par le plus petit : aussi est elle moindre que les deux autres. Et comme ce n’est pas à elle à qui le nom de Pic mart, ou Pic verd convient, aussi elle est rouge en deux lieux, mais au demeurant est toute merquee, comme le Pic verd : toutesfois que leurs madrures sont differentes. Quelques uns comme en nostre païs du Mans, la nomment un Cul rouge, pource que les plumes du dessus & dessous de sa queuë, comme aussi entre les jambes, sont rouges : mais lon en trouve plusieurs especes, qui ont difference entre elles, comme ferons apparoistre cy apres. Toutes ont mesme maniëre de se pasturer