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leporino villo ei nomen hoc dedere. Et peu apres dit : à Coturnicibus magnitudine tantum differt Lagopus, croceo tinctu, cibis gratissima. Il en dit beaucoup d’avantage. Et Martial en un distique, ha mis : Si meus aurita gaudet Lagopede Flaccus. Ce n’est de merveille si nous ne la voyons par les plaines de France : car elle se tient tousjours joignant la neige, es lieux qui ne sont eschauffez du Soleil. Si lon saignoit voir une Perdris de la grosseur d’un Pigeon blanc, lon auroit totalement la forme de la Perdris blanche, aussi ne vole non plus que fait la Perdris. On en prend au lasset, ou à la pautiere. Si on la garde en vie, on ne le peut nourrir, d’autant qu’elle ne peut estre apprivoisee, tant est de farouche nature. Il n’y ha eu gens par le chemin du mont Senis en hyver, vivants par les hosteleriës, à qui lon n’en ait servy à manger : mais peu y prennent garde. Leur chair est saine, & delicate aux gens sains, & dont les malades peuvent estre repeuz sans crainte. Les Latins ont ainsi retenu plusieurs dictions Grecques, n’ayant les Latines pour les exprimer : car Lagopus est diction Greque.

Du Pluvier, & Guillemot.
CHAP. XVIII.


PLUVIER est oyseaux qui retient constamment son appellation en touts lieux de noz contrees. Il semble qu’il est ainsi nommé pource qu’on le prend mieux en temps pluvieux qu’en nulle autre saison. Nous n’avons rien de plus notable en luy que de le voir si frequent en France, & toutesfois est rare oyseau à beaucoup d’autres nations. Lon en apporte vendre si grande quantité par les marchez des villes tout au long de l’hyver, que c’est chose nouvelle. Cest oyseau ne va jamais qu’en troupe, en laquelle lon n’en voit gueres moins que de cinquante pour volee. Et toutesfois il n’en apparoist aucun en esté, & peu au printemps : car alors ils sont empeschez, & accouplez deux à deux à faire leurs nids, & nourrir leurs petits en autre païs. Ils hantent communement les campagnes de terre grasse en plaines labourees. Leur couleur n’est pas variable à muer au masle & femelle, comme à plusieurs autres oyseaux, mais est si constante qu’on ne sçauroit distinguer le masle de sa femelle. C’est un oyseau passager qui commence à n’apparoistre plus gueres apres qu’il ha neigé, nonobstant qu’on en peust bien trouver jusques en Caresme. Lon en apporte souvent des contrees de la Beausse en si grande abondance, comme aussi des autres lieux labourables, que qui l’entreprendroit, en trouveroit au marché à charger charrettes. Et d’autant qu’il est delicat, & de bon manger, encores qu’il ne soit de corpulence que de Pigeon, quelquefois est vendu au pris d’un Chapon. Ce point est pour faire entendre, qu’estant cogneu de touts, il tient place entre les oyseaux delicieux. Et pource qu’il est en estime de haut pris, le gain que les paisans y pretendent, fait qu’ils s’estudient de le prendre en diverses maniëres, & quasi en toutes contrees de ce royaume, lesquelles il nous ha semble bon escrire en cest endroit.