Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/279

Cette page n’a pas encore été corrigée

large poictrine, & les membres bien fourniz : les aelles bien en-plumees : la queuë haulte, garnie de double ordre de plumes pendentes, & rempliees contre bas. Aussi faut qu’ils soyent vioges vigilants, & promps à chanter souvent, & qu’ils ne s’espouventent sinon forcez de grande occasion, & mesme jusques à se monstrer en courage de faire teste contre touts animaux nuïsibles, defendants tout le troupeau des Poulles : & de moult grand cœur, venger les injures que leurs feront les autres animaux. Aussi eux mesmes cherchants à manger, faut appeller tousjours les Poulles, pour le leurs departir. Tels Cocs veulent estre les maistres, & estre comme roys sur les autres : car ils maistrisent en chasque maison ou ils vivent, & s’aquierent ce tiltre par vertu de combat. Telle est donc la vertu des Cocs plus vioges que les autres, qui se trouvants inferieurs en resistant, & voulants perseverer, font combat jusques à les faire mourir : & soudain qu’un aura esté vainqueur, contraindra le vaincu à se cacher, & chantera à pleine voix au grand dueil de celuy qu’il aura vaincu : car tels animaux supportent le service mal aysement. Les anciens ont tenu que la presence des Cocs est espoventable au Lion. Mais ils n’en ont dit la raison, sinon qu’estant moult fiere beste, & regardant souvent vers le ciel ayant la creste levee, ont aussi la queuë droicte, & les plumes retournees en faucille, & se marchent de grande braveté. La vertu que les medecins praticiens anciens, & modernes ont attribué à la decoction, ou bouillon d’un vieil Coc, l’ont prins des escrits de Dioscoride, qui escrivit son histoire long temps avant Galien : & duquel les medecins Arabes en ont traduit ce que nous voyons en leurs receptes. Dioscoride ha ordonné qu’on doit choisir un Coc bien fort vieil, lequel apres estre acoustré, doit estre farcy par dedens le ventre des racines de Polipode, de la semence de Chartamus, du sel de la Mercuriale, de la Soldanelle, & puis recousu, puis bouillu en l’eau jusques à ce qu’il soit fort cuit. Iceluy fera une decoction laxative, à laquelle y adjoustant autres semences, & drogues propres es autres maladies : comme asmatiques, gouteux, & malades de la Jaunisse, & autres plusieurs, sont gueris sans grande difficulté : mais il faut que lon prepare le Coc pour estre meilleur : car tout ainsi comme un chevreau est nourry de Lierre pour avoir meilleur sang par ceux qui ont la gravelle, aussi faut que le Coc soit nourri avec de l’apast de bon blé avec du lait, lespace de huit jours. Les hommes sçachants les Cocs estre durs à manger, ont inventé de les chastrer pour les attendrir : & lors changent leur nom, & sont appellez Chapons. Mais les Cochets encores tendres ne sont moins utiles que les Chapons. Entre les Cocs, il y en ha quelques uns qui sont moins genereux, & de si failly courage, qu’on est quelquesfois en doute, à sçavoir s’il sont masles ou femelles. De telle maniëre est bon choisir pour chaponner. Les testicules des Cochets encores vierges sont bons à faire restauratifs, & s’est trouvé quelques experimentateurs, qui en ont nourry les ethiques, & les ont gueris, comme aussi ceux qui estoyent affoiblis par longues maladies. Auteurs suffisants asseurent, comme chose veritable, que tels testicules sont utiles à augmenter la matiëre spermatique, & aydent à la generation. Le Coc, la Poulle, & le Chapon sont oyseaux si communs à toute nation, & desquels tant d’autheurs ont fait mention, que d’en parler apres eux n’est que redicte. Et de fait n’en vouldrions parler un seul mot, n’estoit qu’il y ha difficulté es noms de diverses especes. Les gros Chapons du Mans de haute gresse sont estimez tendres, & de bon manger en touts lieux du royaume de France.