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quelque nom vulgaire, disoyent qu’ils en manient souvent, & distribuent es festins : mais qu’ils n’ont ouï son propre nom. C’est un oyseau qui fait ses petits bien tard : car encor en avons trouvé qui ne sçavoyent voler à la fin d’Octobre. Il est quasi de la gradeur d’un Corlis. Auquel enseignons une particuliëre chose, pour le sçavoir cognoistre qui n’est en aucun autre oyseau : Cest, qu’il ha les jambes grosses au dessous du ply des genoux, à raison de ce qui provient de l’os de la jambe, qui est gros oultre mesure en ce’st endroit lá. Donc pour le faire mieux cognoistre luy avons laissé ce nom Oedicnemus. Il n’ha que trois doigts es pieds, nomplus que la Cane petiëre, Pluvier, & Ostarde. Si ce n’estoit que son bec est longuet, noir par le bout, jaulne contre la teste, & autre que celuy d’une Ostarde, lon penseroit qu’il fust Ostardeau : car à la verité il ha les aelles, comme d’une Ostarde, c’est à sçavoir blanches dessous, & noires aux extremitez. Sa queuë aussi ha les extremitez noires, dont les plumes sont merquetees de blanc : le dessus du dos est comme d’un Francolin : car ses plumes de couleur enfumee, sont tachees de noir, le long de la tige, & sont doubles, comme en plusieurs oyseaux de campagne. Ses jambes longues nous invitoyent à le mettre entre les oyseaux de riviere, & principalement luy voyant les cuïsses nues, toutesfois les doigts de ses pieds courts, nous en retiroyent, & induisoyent à le mettre du nombre des oyseaux terrestres de campagne.

Du Francolin.
CHAP. VI.


NOUS ne cognoissons aucun oyseau en nostre païs qui soit nommé Francolin : aussi est-ce un nom emprunté des estrangers. Il est Italien, exprimant l’oyseau que les anciens appellent Attagen. Et tout ainsi que maintenant, quand nous voulons louër quelque viande pour son excellent goust, & principalement le poisson, ou autre chose, nous le disons la Perdris de mer, tout ainsi anciennement perferents le Francolin à la Perdris, disoyent le Francolin de mer : car le Francolin estoit plus estimé, que la Perdris, Faisan, & tout autre gibbier. Cest oyseau est de montagne, qui ne descend es plaines, parquoy n’est gueres veu ça bas en noz païs de France, s’il n’y est apporté d’ailleurs. Il est bien vray qu’on en voit quelquesfois par les marchez des villes, qui ne sont assises gueres loing des haultes montagnes. L’on en voit à Venise, & Boulongne, & à Rome. Quelques hommes dignes de foy, nous ont rapporté qu’ils en avoyent veu manger en France, à la table du feu Roy Françoys restaurateur des lettres : qui avoyent esté envoyez des monts Pyrenees, & des montagnes des Foys. Pline parlant de cest oyseau, au quarante-huittiesme chap. du dixiesme livre de l’histoire naturelle, disoit que celuy de Ionië avoit eu le premier lieu en excellence, l’estimant plus friand que d’autre lieu. Qui est chose conforme à ce que Martial en ha escrit en tels mots. Inter sapores fertur alitum primus Ionicarum gustus Attagenerum. Dit d’avantage que le Francolin estant sauvage, fait quelque voix en chantant, mais captif ne sonne aucun mot, & que anciennement estoit entendu du nombre des oyseaux rares : mais (dit il) on le prend maintenant en Gaule, Espagne, & par les