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blanc & quasi comme de couleur pale sur le cendré. Ses yeux sont noirs & petits. L’on ne trouve aucune distinction pour discerner son sexe, comme lon ha acoustumé trouver autres oyseaux. Car tant le masle que la femelle sont de couleur noire, & quelques fois les uns sont de couleur plus tanee par le dessous du ventre, que les autres. La Poulle d’eau est tousjours sur les eaux par les marais. Et combien qu’elle n’ha pas les pieds plats, comme les Oyes : toutesfois nature ha monstré en avoir eu soing : car sachant qu’elle devoit hanter es fondrieres marescageuses, luy ayant donné les jambes raisonnablement longues, de belle couleur verdoyante en obscur, luy ha aussi baillé quatre doigts longs, dont les trois de devant ont une large plataine en chasque articulation, tellement que combien que son pied ne soit plat, toutesfois est estandu bien large. Car aussi y ha des membranes plates qui ne s’entretiennent aucunement. C’est oyseau se porte droit sur ses jambes, & court vistement. Sa langue est plus molle que celle d’une Poulle. Ses ongles sont grandelets & noirs. Ses aelles sont voultees suyvants l’arondissement de son corps. Les Poulles d’eau sont grasses en hyver : Aussi est ce leur saison : car elles ne sont bonnes en temps d’esté. Les paisants les sçavent prendre au lasset. Car quelconques qu’on puisse voir au marché, est sans estre engluee ne blessee. Elles font leurs œufs en temps d’esté, quasi aussi gros comme ceux d’une Poulle, & leurs nids sur terre : car elles ne montent jamais sur branche, mais dorment à terre. Le Jesier d’une Poulle d’eau n’est rien moindre que celuy d’un Chapon, ayant la rate tout joingnant, estroite & gresle par un bout, & espesse par l’autre, ainsi ployee comme un fer de cheval, large comme demië noix. Elle ha le foye conforme à la grandeur du Jesier, ayant le fiel attaché dessous le lopin dextre en une vessie grosse comme le petit doigt. Les oyseaux ont le diaphragme comme les bestes terrestres, & ont aussi les poulmons dessous les costez. On trouve les Poulles d’eau avoir les œufs ja formez & attachez au dos des l’hyver. Qui suyvra le droit boyau des Poulles d’eau jusques bien haut, trouvera deux intestins en chasque costé, ayants un paulme de long, qui sont repliees à l’extremité d’enhaut, chose quasi commune à touts autres oyseaux. Elle se paist d’herbe & mange indifferemment toutes maniëres de grains, comme aussi des petites pierres luysantes & des senelles. Sa chair est de bon goust & tendre, & sent quelque peu le sauvage, qui ne la rend de difficile digestion.

Autre espece de Poulle d’eau, autrement nommee Macroule, ou Diable de mer.
CHAP. XXV.


APRES avoir parlé des Plongeons & de la Poulle d’eau, voulons parler d’une autre maniëre de Poulle d’eau differente à la susdicte, que les habitans de Normandie nomment Macroule, & à Paris un Diable de mer. Elle se plonge incessamment en l’eau douce, & est de si exquise couleur noire que l’oyseau en semble terni. La tache blanche, qui est sur sa teste, est encor plus large que à la Poulle d’eau : aussi est quelque peu de plus grande corpulence. Elle traine ses jambes apres elle, & ha ainsi les doigts larges & separez les uns des