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Du Fau-perdrieux.
CHAP. XVII.


NOUS mettons le Fau-perdrieux au nombre des oyseaux de rapine, auquel n’avons trouvé aucun nom ancien Grec, ne Latin mieux à propos que de le nommer Circus : Aristote, dit, Tertium Circus, claudum altero pede. Nous n’avons gueres accoustumé les nourrir pour nous servir à prendre les oyseaux sauvages : car ils sont moins gentils que les autres : joint qu’ils ne volent trop hastivement. Si est-ce qu’en avons veu ja leurrez pour la Perdris, pour la Caille, & pour le Connin. Ils volent encor mieulx que le Milan, mais moins que le Faulcon, Sacre, & son Tiercelet, qui nous est assez notoire, apres les avoir veuz au vol des Sacres, & Faucons, au lieu de Milan. Ils descendent au Duc comme le Milan : mais soubdain qu’ils voyent qu’on lasche les Sacres pour les prendre, essayent à fuir au loing, & non pas en hault, comme fait le Milan : parquoy leur vol est penible. Mais le Fau-perdrieux qui est aussi de grande force, se deffend vaillamment : car il est beaucoup plus fort q’uun Milan. Cela est cause qu’il fault pour le moins lascher quatre oyseaux pour le prendre. Il n’est pas amy du Hobreau, ne de la Cresserelle, comme il appert quand lon va à la chasse de la Caille avec les Chiens, que le Hobreau ha coustume suyvre : car si le Fau-perdrieux y arrive, le Hobreau est contraint de s’en fuïr pour eviter sa passee : car le Fau-perdrieux est oyseau qui vole assez roide pres de terre sans gueres battre des aelles. Mais à fin que facions mieux entendre de quelle especes d’oyseau de rapine pretendons parler, dirons la figure & couleur. Il est quelque peu de moindre corpulence qu’un Milan, toutesfois plus hault enjambé, ayant le bec, & les ongles moins crochus que touts autres oyseaux de rapine. Aussi boit il quand il se trouve à quelque mare. Sa jambe est bien deliëe, & jaulne, couverte de tablettes. Sa queuë est noire, comme aussi le bout des aelles : mais les plumes sont tannees obscures. Le dessus de sa teste, & dessous la gorge est blanchastre sur le rougeastre, comme aussi est le dessous du ply des aelles au deux costez de l’estomach. Les plumes qui luy couvrent les ouïes sont noires : son bec joignant la teste est de couleur plombee : mais le bout est comme noir. Ce n’est pas un oyseau passager au païs de France : car on le trouve faisant son nid sur les summitez des haults arbres separez, par les plaines d’Auvergne le long des clapiers, ou il fait moult grands dommages sur les Connins. Il ha le col moult court au contraire de l’Autour qui l’ha long. Nous l’eussions facilement prins pour celuy qu’Aristote nomme Percnopterus, ou Oripelargus, luy voyants la teste blanchastre, comme avoit dit Aristote : mais ne le voyants criard, ne batu des Corbeaux, avons attribué ces enseignes à la Buse. Parquoy ne demeurera sans aucune appellation antique.