Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/118

Cette page n’a pas encore été corrigée

LE SECOND LIVRE DE LA NATURE DES OYSEAUX DE PROYE,

tant de jour que de nuict, avec leurs portraicts & figures.

Du grand Vautour cendré.
CHAPITRE PREMIER.


ON peut cognoistre qu’il y ha deux especes de Vautours moult communs en plusieurs endroits tels que les anciens les nous ont signifiez. Parquoy estants asseurez que le Vautour cendré est le plus grand oyseau de rapine, dont ils ont parlé, au moins qui est venu en nostre cognoissance, & duquel Aristote ha fait expresse mention, l’ayant separé de l’Aigle, & qu’il est quasi une fois & demie plus grand, il nous ha semblé bon le descrire le premier en cest ordre. Et tout ainsi comme Aristote en ha cognu des cendrez & des bruns, c’est à dire qui blanchissent au regard des autres, il fault que nous les distinguions presentement, & descrivions par le menu. Plusieurs autres oyseaux de rapine ont telle difference de la femelle ha leurs tiercelets, qu’ils semblent quasi estre d’espece differente. Mais ne les Vautours, ne les Aigles n’ont telle distinction : toutesfois que les femelles sont plus grandes que les masles. Les Grecs exprimants un Vautour dient Gyps, & les Latins Vultur. Les paisants de Crete, & les autres qui habitent par les montaignes de divers païs, & ceux des plaines d’Egypte & Arabie deserte s’estudient de les prendre en diverses manieres. Et apres qu’ils les ont prins, ils les escorchent, à fin de vendre les peaux aux pelletiers, qui les sçavent conroyer, & accoustrer soigneusement. Ils vendent aussi la plume des aelles, & de la queuë aux artilliers pour empenner leurs flesches. Le Roy Françoys pere nourrissier des lettres (que Dieu absolue) avoit un grand oyseau de rapine, lequel, à ce qu’on dit, luy fut nommé un Milion. Plusieurs nous ont raporté l’avoir veu à Fontainebleau, & ayants ouï les enseignes, pensons que ce fust un Vautour. Nous estimons qu’ils sont passagers en Egypte, comme les Cigognes. Les autres oyseaux de rapine sont differents aux Vautours, pource qu’ils ont le dessoubs des aelles tout nud sans plumettes, mais les Vautours l’ont couvert de fin duvet. Leur peau est quasi aussi espesse que celle d’un chevreau : & mesmement lon trouve un endroit au dessoubs de leur gorge, de la largeur d’une paulme, ou la plume est rougeastre, semblable au poil d’un veau : car telle plume n’a point ses tuyaux formez, non plus que aux deux costez du