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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

d’adieu à chaque loge : partout il reçut un peu de tabac ou quelque autre présent. Si, dans ces expéditions, ils font des femmes prisonnières, ils les emmènent au camp et les livrent à leurs femmes, mères et sœurs : celles-ci les assomment aussitôt à coups de hache et de couteau, vomissant contre ces pauvres malheureuses, dans leur rage effrénée, les paroles les plus accablantes et les plus outrageantes. « Chiennes de Pieds-Noirs, s’écrient-elles, ah ! si nous pouvions aujourd’hui dévorer les cœurs de tous vos enfants, et nous baigner dans le sang de votre maudite nation ! »

Les Jouts, une tribu des Serpents, brûlent les corps de leurs parents avec les meilleurs chevaux que possédait le défunt. Le cadavre avec les chevaux égorgés est placé sur un grand tas de bois sec. Quand la fumée s’élève en tourbillons, ils croient que l’âme du sauvage s’envole vers la région des esprits, emportée par ses fidèles coursiers ; et pour exciter ceux-ci à un plus rapide essor, ils poussent tous à la fois des hurlements affreux.

Les Sampeeches, les Payous et les Ampayous sont les plus proches voisins des Serpents. Il n’y a peut-être pas dans tout l’univers un peuple plus misérable, plus dégradé et plus pauvre. Les Français les appellent communément les Dignes-de-pitié, et ce nom leur convient à merveille. Le pays qu’ils habitent est une véritable bruyère ; ils logent dans les crevasses des rochers ou dans des trous creusés en terre ; ils n’ont pas d’habillements ; pour