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VOYAGES

le saisir. L’un tournait le calumet avant de mettre le tuyau à la bouche ; le suivant faisait un demi-cercle en l’acceptant ; un autre tenait le récipient en l’air, un quatrième le baissait jusqu’à terre et ainsi de suite. Je suis naturellement enclin à rire ; j’avoue qu’en cette occasion j’ai dû faire des efforts sérieux pour ne pas éclater, en contemplant la gravité que ces pauvres sauvages conservaient au milieu de ces simagrées ridicules. Ces diverses façons de fumer entrent dans leurs pratiques superstitieuses de religion ; chacun a la sienne, dont il n’oserait dévier pendant toute sa vie, de peur de déplaire à ses Manitous. Je leur fis connaître les motifs de ma visite, le commandement que Dieu avait fait aux Robes-Noires d’aller prêcher sa sainte loi à toutes les nations de la terre, l’obligation que tous les peuples avaient de la suivre dès qu’ils la connaîtraient, le bonheur éternel qu’elle procure à tous ceux qui la suivraient fidèlement jusqu’à la mort, et l’enfer avec tous ses tourments qui serait le partage de quiconque fermerait l’oreille à la parole de Jésus-Christ. Je leur fis concevoir les avantages que leur procurerait une mission, et je finis en leur prêchant les principales vérités du Christianisme. Les sauvages m’accordèrent la plus grande attention et parurent dans l’admiration de la sainte doctrine que je venais de leur expliquer. Ils tinrent conseil entre eux pendant l’espace d’une demi-heure, et l’orateur, au nom de tous les chefs, m’adressa les paroles suivantes : « Robe-Noire,