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VOYAGES

leurs propres besoins, pour leurs tentes, leurs robes et leurs couvertures de selle.

Le 28, nous passâmes à gué la Fourche-du-Sud de la Plate. Toute cette région, jusqu’aux grandes montagnes, est une véritable bruyère, rocheuse et sablonneuse, couverte de scories et d’autres substances volcaniques ; il n’y a d’endroits fertiles que sur les bords des rivières et des ruisseaux. Cette région, nous dit un voyageur moderne, ressemble aux déserts de l’Asie par ses vastes plaines onduleuses et dégarnies de bois, et par ses terres incultes, arides et solitaires, qui fatiguent l’œil par leur étendue et leur monotonie. C’est un pays où l’homme ne fait point sa demeure ; dans certaines saisons de l’année, le chasseur même et son coursier y manquent de nourriture. L’herbage y est brûlé et dépérit ; les rivières et les ruisseaux sont à sec ; le buffle, le cerf et le chevreuil se retirent dans des prairies éloignées, se tiennent sur les contins de la verdure expirante, et laissent derrière eux une vaste solitude inhabitée, entrecoupée de ravins et de lits d’anciens torrents, qui aujourd’hui ne servent qu’à tourmenter le voyageur et à augmenter sa soif. Par-ci par-là la surface plane de ce grand désert est interrompue par des monceaux de pierres, confusément entassées comme des ruines ; ou bien il est traversé par des bancs de rochers, qui se dressent devant le voyageur comme d’infranchissables barrières ; telles sont les Côtes-Noires. Au delà s’élèvent les montagnes Rocheuses, les limites du