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VOYAGES

de large d’un bord à l’autre, et sa profondeur n’est guère que de deux à six pieds ; le fond est un sable mouvant. Elle parcourt une distance immense à travers une large et verte vallée, et reçoit la grande abondance de ses eaux de plusieurs branches qui descendent des montagnes Rocheuses. L’embouchure de cette rivière est à huit cents milles de Saint-Louis par eau, et forme le point de division du bas et du haut Missouri. J’étais souvent saisi d’admiration à la vue des scènes pittoresques dont nous jouissions tout le long de la Plate. Imaginez-vous de grands étangs, dans les beaux parcs des seigneurs européens, parsemés de petites îles boisées ; la Plate vous en offre par milliers, et de toutes les formes. J’ai vu de ces groupes d’îles qu’on aurait pris facilement de loin pour des flottilles, mêlant à leurs voiles déployées des guirlandes de verdure et des festons de fleurs ; et parce qu’autour d’elles le fleuve était rapide, elles semblaient elles-mêmes fuir sur les eaux, complétant le charme de l’illusion par cette apparence de mouvement. Les deux bords de cette rivière ne sont point boisés ; les arbres que les îles produisent principalement sont les peupliers, communément appelés cotonniers ; les sauvages les coupent en hiver et l’écorce sert de nourriture à leurs chevaux. Sur la plaine de la Plate, on voyait bondir de nombreux cabris ; j’en voyais souvent plusieurs centaines d’un seul coup d’œil ; c’est l’animal le plus agile des prairies. Le chasseur emploie