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VOYAGES

sage un charme que ne saurait jamais oublier le voyageur qui le voit pour la première fois. Le cerisier sauvage, le mûrier, le frêne y sont très-communs. Le sol, dans tous les bas-fonds, est prodigieusement riche, fortement imprégné de substances salines et de pierres calcaires décomposées.

Ces rivages cependant sont très-incertains et s’éboulent continuellement ; ce qui rend bourbeuse et dégoûtante l’eau de ce fleuve, d’ailleurs très-légère et saine à boire. Les bancs de sable et les arbres au fond de l’eau sont si nombreux, que l’on finit par s’y habituer et qu’on ne songe plus guère aux dangers qu’on court à chaque instant. Il est intéressant d’observer à quelle étendue les racines s’enfoncent dans ce sol fertile ; là où la terre s’éboule, on en voit toute la profondeur ; en général il n’y a qu’une grosse racine centrale, pénétrant à dix ou douze pieds, et d’autres racines plus minces qui s’étendent tout à l’entour.

Après dix jours de navigation, j’arrivai à Westport, petite ville frontière du territoire des sauvages, d’où je devais me mettre en route pour les montagnes.

Le 30 avril, je partis de Westport avec l’expédition annuelle de la Compagnie américaine des pelleteries, qui se rendait à la Rivière-Verte, l’une des fourches du Rio Colorado. Jusqu’au 17 mai, nous nous dirigeâmes vers l’ouest, traversant des plaines immenses, dépouillées d’arbres et d’arbrisseaux, excepté le long des petites rivières, et entre-