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UNE ANNEE DE SÉJOUR

une bande de ces brigands armés en guerre. Ils furent reçus comme des gens qui se présentent en amis ; on amena les quatre principaux dans la loge du Missionnaire, on fuma le calumet, on s’entretint des nouvelles du temps, on parla de la prière. Ils écoutèrent avec attention et ne manifestèrent ni étonnement, ni répugnance ; ils apprirent au P. Point que tout récemment ils avaient vu arriver dans l’un des forts du pays, un homme qui n’avait point de femme, qui portait sur la poitrine un grand crucifix, qui lisait tous les jours dans un gros livre, qui faisait le signe de la croix avant de manger, enfin qui était habillé comme les Robes-noires de Sainte-Marie (c’était probablement M.  Demers qui visitait les forts).

Le Père fit tout ce qu’il put pour gagner leur confiance, après quoi ils furent répartis dans les meilleures loges du camp. Il semblait que de tels hôtes eussent dû valoir des otages ; cependant vers le milieu de la nuit l’explosion d’une arme à feu se fit entendre : c’était un Tête-plate qui avait tué un Pied-noir au moment où il s’éloignait du camp accompagné de quatre chevaux. Heureusement le voleur n’appartenait pas à la bande reçue dans le camp, ce qui fit que, loin de les inquiéter à son sujet, on leur offrit même la permission de l’enterrer ; mais soit qu’ils voulussent paraître ne pas approuver son fait, ou qu’ils soupçonnassent le danger de quelques représailles, ils laissèrent aux loups le soin de sa sépulture et firent leurs adieux.