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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

chaque couplet, le médecin joint les deux mains, les approche de ses lèvres et souffle sur le malade. Cette opération se répète jusqu’à ce que, par un tour de sa façon, il lui fasse sortir de la bouche une petite pierre blanche, ou la griffe d’un oiseau ou de quelque autre animal. Aussitôt il se lève, va d’un air de triomphe montrer sa trouvaille à ceux qui s’intéressent à la santé du malheureux sauvage, et les assure de son prochain rétablissement. Au reste, que le malade meure ou que, par hasard, il se rétablisse, peu importe ; l’essentiel pour le charlatan est toujours, ici comme partout ailleurs, de se faire bien payer, et il n’y manque pas.

Leurs idées religieuses ne sont pas moins extravagantes et curieuses. Voici ce que croient les Tchinouks, ou du moins ce qu’ils croyaient avant d’être mieux instruits. Selon eux, les hommes furent créés par une divinité qu’ils nomment Étalapasse, mais dans un état très-imparfait ; leur bouche et leurs yeux étaient fermés, leurs mains et leurs pieds immobiles ; en un mot, c’étaient plutôt des masses vivantes de chair que de véritables hommes. Une seconde divinité qu’ils appellent Écanuum, moins puissante, mais plus bénigne que la première, vit les hommes dans cet état d’imperfection et en eut pitié : elle leur ouvrit la bouche et les yeux avec une pierre aiguë, et donna l’agilité à leurs pieds et à leurs mains. Cette divinité compatissante ne se contenta pas de ces premiers bienfaits : elle enseigna aux