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VOYAGES

de la Compagnie de la baie d’Hudson, on est sûr d’un bon accueil : ils ne s’arrêtent pas seulement aux démonstrations de la politesse et de l’affabilité, ils préviennent vos désirs pour vous rendre service. Dans cette circonstance, le commandant du fort, M. Macdonald, Écossais de nation, alla si loin, qu’il fit préparer par sa dame et mettre, à mon insu, parmi nos provisions toutes sortes de petites douceurs, telles que sucre, café, thé, chocolat, beurre, biscuits, farine, volaille, jambons et chandelles. Outre les instructions que j’adressai pendant la messe aux Canadiens engagés au service du fort, j’eus plusieurs conférences avec le chef des Shuyelpi ou Chaudières, homme intelligent, qui m’invita à venir évangéliser sa nation.

Nous quittâmes le fort le 18. Il ne se passa rien de bien remarquable pendant notre retour, si ce n’est un fait que je veux raconter pour l’instruction de ceux qui pourraient faire la même route que nous : il ne prouve que trop combien il est utile d’être quelquefois méfiant, et que partout on retrouve des enfants d’Ève. Nous avions laissé à la traverse des Pends-d’oreilles cinq ballots de viande sèche : à notre retour, n’en trouvant plus que deux, je demandai au chef ce que les autres étaient devenus. « J’ai honte, Robe-noire, me répondit-il, j’ai peur de vous parler. Vous savez que j’étais absent lorsque vous avez mis vos ballots dans ma loge. Ma femme les a ouverts pour voir si la viande n’était pas moisie ; les