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VOYAGES

Compagnie de la baie d’Hudson, M.  Mac Loughlin, au service duquel Charles était dévoué.

Il nous fallut trois jours pour nous rendre à la traverse des Kalispels. Le long de la rivière nous rencontrâmes, de distance en distance, un grand nombre de petits camps sauvages, de quatre à six loges. Ces misérables gens sont obligés de s’éparpiller en hiver pour trouver de quoi vivre par la pêche et par la chasse. Dans une pauvre petite hutte de joncs, je trouvai cinq vieillards presque octogénaires, dont trois aveugles et deux borgnes : c’était une image frappante de la misère humaine. Je leur parlai longuement des moyens de salut et du bonheur de la vie future ; leurs réponses édifiantes m’attendrirent jusqu’aux larmes : « Grand-Esprit, disaient-ils, quel bonheur nous vient dans nos vieux jours ! Nous vous aimerons, ô notre Père ! oui nous vous aimerons jusqu’à la mort. » Dès qu’ils eurent compris la nécessité du baptême, ils se jetèrent à genoux pour le recevoir. Je n’ai encore jamais rencontré parmi ces gens, je ne dirai pas de l’opposition, mais pas même la moindre marque de froideur ou d’indifférence.

La traverse des Pends-d’oreilles offre un bel emplacement pour une réduction. La prairie est grande et fertile, le bois ne manquera jamais, la rivière est très-poissonneuse. Au fond de la prairie est un petit lac ou marais d’environ six milles de circonférence, véritable rendez-vous de toute espèce d’oiseaux aquatiques. On y serait à proxi-