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VOYAGES

lui parler. Enfin je lui annonçai que je sortais à l’instant même de sa loge, et que j’avais baptisé sa femme. « J’ai appris, me répondit-il, votre arrivée aux montagnes l’année dernière ; j’ai su que vous y avez baptisé beaucoup de nos gens. « Je suis pauvre et vieux ; je n’espérais pas avoir le bonheur de vous voir. Robe-noire, rendez-moi aussi heureux que ma femme ; moi aussi je veux appartenir au Grand-Esprit, et nous l’aimerons toujours. » Je le conduisis au bord d’un torrent tout proche et lui donnai le baptême avec le nom de Simon. En me voyant partir, l’heureux vieillard ne cessait de crier et de répéter : « Oh ! que Dieu est bon ! je vous remercie, Robe-noire, du bonheur que vous m’avez procuré ! Oh ! j’ai le cœur si content ! Oui, j’aimerai toujours Dieu ! Oh ! que Dieu est bon ! que Dieu es bon ! »

Ces petites aventures sont nos consolations. Je n’aurais voulu changer en ce moment ma situation pour aucune autre sur la terre. J’ai la ferme conviction qu’une telle rencontre vaut seule un voyage aux montagnes. Ah ! bons et chers Pères d’Europe, je vous en conjure au nom de Jésus-Christ le sauveur du monde, ne balancez pas à venir dans cette vigne : la moisson y est mûre et abondante. Le Seigneur ne nous dit-il pas : « Ignem veni mittere in terram, et quid volo nisi ut accendatur ? » C’est parmi les pauvres sauvages de ces montagnes isolées, que le feu de la grâce divine s’allume partout. Parlez-leur des