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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

assez prudente et pas trop vicieuse : je m’attachai à sa queue et tins ferme : au moyen de quelques cris et coups de fouet, la bonne bête me traîna fort patiemment jusqu’au sommet. Là nous jouîmes un instant du plus beau coup d’œil qu’on puisse s’imaginer : au bas, la rivière et ses environs ; au-dessus de nos têtes, des rochers s’élevant graduellement en amphithéâtre ; en face, dans le lointain, des montagnes à perte de vue, couvertes de pins jusqu’aux sommets. En descendant je changeai de position, je m’accrochai à la bride de ma mule, qui, continuant sa route pas à pas, me déposa sain et sauf, au pied du mauvais rocher (c’est le nom que lui donnent les sauvages).

La Rivière-à-Clark passe ici entre deux hautes montagnes escarpées. Cette belle rivière présente successivement tous les aspects capables d’enchanter le voyageur : tantôt ses eaux coulent majestueusement avec un doux murmure entre deux rives ombragées d’arbres de toute espèce ; tantôt elle s’étend dans un lit plus spacieux et se transforme en une large surface, calme, unie et resplendissante comme un cristal. Bientôt des rochers la rétrécissent ou l’interceptent ; alors elle s’élance en courants impétueux où l’eau s’échappe rapide comme un éclair, en chutes et en cascades où le mugissement des ondes imite le fracas des tourbillons que la tempête excite dans la forêt. En un mot, rien de plus varié que son cours, rien de plus pittoresque que ses rives. J’y ai surtout remarqué les différen--