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VOYAGES AUX MONTAGNES ROCHEUSES

contre des Pieds-noirs. Ils m’amenèrent dix-sept chevaux et dix jeunes guerriers. Ces dix braves, dont plusieurs avaient été criblés de balles et de flèches dans différentes escarmouches, mont montré pendant tout le voyage un dévouement, une docilité et une complaisance au-dessus de tout éloge, s’efforçant de deviner et de prévenir jusqu’à mes moindres besoins.

Nous nous mîmes en route dans l’après-dinée du 28 octobre, et fîmes environ quarante milles en descendant la vallée de la Racine-amère. Le premier jour, nous ne rencontrâmes qu’un chasseur solitaire, chargé d’un gros chevreuil dont il nous offrit généreusement la moitié. Le lendemain, nous eûmes à supporter la neige qui tombait à gros flocons ; chemin faisant, nous prîmes un écureuil d’une nouvelle espèce : il avait la grandeur d’un rat ordinaire, les sourcils blancs, les oreilles rondes, le dos et la queue d’un gris obscur mêlé de rouge. Nous traversâmes un large ruisseau, sans nom, le même que deux célèbres navigateurs, Lewis et Clark, avaient remonté en 1805 pour se rendre dans le pays des Nez-percés ou Sapetans ; je l’appelai le ruisseau de Saint-François de Borgia. Six milles plus bas nous arrivâmes à l’embouchure de la belle rivière de Saint-Ignace, que nous traversâmes aussi. Elle entre dans la vallée de Sainte-Marie ou de la Racine-amère par un beau défilé, appelé communément par les montagnards ou chasseurs canadiens, je ne sais trop pourquoi, la porte