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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

chef, content du poste que lui avait assigné la Providence, repoussa toujours des offres si honorables, sans jamais donner d’autre raison de son refus que celle-ci : « Le Maître de la vie m’a fait naître chez les Têtes-plates, c’est au milieu des Têtes-plates que je dois mourir. » Amour de la patrie bien recommandable sans doute ; mais ce qui l’est peut-être encore plus dans un guerrier, c’est la vraie humilité dont toutes ses paroles sont empreintes. « Avant de connaître le vrai Dieu, me disait-il un jour, hélas ! que nous étions aveugles ! on priait, mais à qui adressait-on ses prières !… Vraiment, je ne sais pourquoi ni comment le Grand-Esprit nous "a soufferts si longtemps… » Aujourd’hui, non content d’être le premier à tous les offices qui se font à la chapelle, il est toujours le dernier qui cesse de prier ou de chanter dans sa loge, et le matin, avant le point du jour, ses chants et ses prières ont déjà recommencé.

Le fond de son caractère est la douceur, ce qui ne l’empêche pas de s’armer d’une sainte sévérité, lorsqu’il voit quelque chose d’inconvenant. En voici une preuve. Quelques jours avant notre arrivée, une jeune personne s’étant absentée de la prière pour une raison qui ne lui semblait pas légitime, il prit un fouet, et reprochant à cette fille légère de se trouver où elle ne devait pas être, et de n’être pas où elle devait se trouver, il la flagella en public de manière à donner un exemple