Page:Pierre-Jean De Smet - voyages aux Montagnes Rocheuses.djvu/268

Cette page a été validée par deux contributeurs.
220
VOYAGES

assuraient qu’ils étaient menacés à cause de leurs péchés.

Mais s’ils sont des enfants par leur simplicité, on peut dire aussi qu’ils sont des héros pour le courage. Jamais ils n’attaquent personne, mais malheur à qui les provoque témérairement ! On a vu bien souvent des poignées de leurs braves attendre de pied ferme des forces vingt fois plus nombreuses, en soutenir le choc sans plier, et, les mettant bientôt en pleine déroute, les faire repentir de leur injuste agression. Quelques semaines seulement avant ma première arrivée aux montagnes, soixante et dix Têtes-plates se voyant forcés d’en venir aux mains avec les Pieds-noirs d’environ cinq cents loges, ce qui suppose à peu près quinze cents guerriers, résolurent d’en soutenir l’assaut en hommes déterminés à mourir plutôt que de lâcher pied. Déjà l’ennemi fondait sur eux, qu’ils étaient encore à genoux, adressant au Grand-Esprit toutes les prières qu’ils savaient ; car le chef avait dit : « Qu’on ne se relève pas avant qu’on ait bien prié. » Leur invocation finie, ils se redressent pleins de confiance, supportent sans reculer le choc de l’ennemi, et bientôt l’obligent à douter de la victoire. Le combat commencé, laissé et repris plusieurs fois, dura cinq jours de suite, c’est-à-dire jusqu’à ce que les Pieds-noirs, enrayés d’une audace qui tenait du prodige, se décidèrent finalement de battre en retraite, abandonnant sur le champ de bataille un grand nombre