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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

dire : Enfin nous voici arrivés au lieu de notre repos. Toutes les fatigues, tous les dangers, toutes les épreuves semblaient avoir disparu ; une seule pensée, celle que nous allions revoir les beaux jours de la primitive Église, préoccupait tous les esprits. Nous ne songeâmes plus qu’à une seule chose ; le fond de toutes nos conversations était : « Comment allons-nous faire pour ne pas manquer à notre grande vocation ? » Je recommandai au P. Point, bon dessinateur et architecte, de tracer le plan des réductions futures. Dans mon esprit, et surtout dans mon cœur, au plan matériel se rattachait essentiellement le plan moral et religieux. Rien ne nous paraissait plus beau que la relation de Muratori ; nous en avons fait notre vade-mecum. Ces sortes de sujets vont nous occuper à l’avenir ; nous laisserons de côté les belles perspectives, les arbres, les animaux, les fleurs, ou du moins nous n’y jetterons plus qu’un coup d’œil en passant.

Du Fort-Hall nous remontâmes la Rivière-aux-serpents jusqu’à l’embouchure de la Fourche-à-Henry. Ce désert est sans contredit le plus aride des montagnes, couvert d’absinthes, de cactus, et de toutes les herbes qui se plaisent le plus dans les mauvaises terres. Nous eûmes recours à la pêche pour notre subsistance ; mais nos bêtes de somme eurent leurs nuits de misère et déjeune, car à peine y trouva-t-on une bouchée de gazon pendant les huit jours que nous mîmes à le tra-