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VOYAGES

nous trouvâmes le précurseur des Têtes-plates dont j’ai déjà parlé, c’est le Rio-Colorado de l’ouest, connu dans les montagnes sous le nom de Rivière-verte.

Nous nous y reposâmes deux jours dans la compagnie du capitaine Frab et de plusieurs autres voyageurs qui revenaient de la Californie. Ce qu’ils nous dirent de ce lointain pays fit tomber bien des illusions, et ceux de notre caravane qui voyageaient pour leur agrément prirent aussitôt le parti de retourner chacun chez soi.

Le 26 juillet, nous songeâmes sérieusement à continuer notre route. Avec un train comme le nôtre, ce n’était pas une petite affaire. Le souvenir de l’expédition de Bonneville était encore récent ; mais notre but nous encourageait. Quoique nous n’eussions avec nous que les objets de première nécessité, les charrettes seules pouvaient les transporter convenablement. Nous mîmes notre confiance en Dieu ; les charretiers fouettèrent leurs mulets, les mulets firent leur devoir, et bientôt, la rivière passée, la file de nos charrettes se déroula de son mieux, serpentant, errant dans presque toutes les directions, au milieu d’un labyrinthe de vallées et de montagnes, obligée de s’ouvrir un passage, tantôt au fond d’un ravin, tantôt sur le penchant d’une roche escarpée, souvent à travers les buissons ; et pour cela il fallut, ici dételer les mulets, là doubler les attelages, plus loin faire un appel à toutes les épaules pour soutenir le convoi sur le bord incliné d’un abîme