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VOYAGES

pièces et en attachèrent les lambeaux au bout de longues perches, qu’ils portèrent en dansant jusqu’à ce qu’ils eussent fait plusieurs fois le tour du village.

On ne saurait se faire une idée de la cruauté d’un grand nombre de ces tribus sauvages, dans les guerres continuelles qu’ils font à leurs voisins. Quand ils savent que les guerriers d’une tribu rivale sont partis pour la chasse, ils entrent inopinément dans leur village, massacrent les enfants, les femmes et les vieillards, et emmènent prisonniers tous les hommes qu’ils peuvent conduire. Quelquefois ils se placent en embuscade, et laissent passer tranquillement une partie de la bande ; tout à coup ils jettent un cri affreux et font pleuvoir sur l’ennemi une grêle de balles et de flèches. Un combat à mort commence aussitôt ; ils s’élancent les uns sur les autres le casse-tête et la hache à la main, et font une horrible boucherie, se glorifiant de leur valeur, et vomissant un torrent d’injures contre les malheureux vaincus ; la mort s’y montre sous mille formes hideuses, et ce spectacle, qui glacerait d’épouvante tout homme civilisé, ne fait au contraire qu’enflammer la rage de ces barbares. Ils insultent et foulent aux pieds les cadavres mutilés ; ils arrachent les chevelures, se roulent dans le sang comme des bêtes féroces ; souvent même ils dévorent les membres palpitants de ceux qui respirent encore. Les vainqueurs retournent à leur village entraînant avec eux leurs prison-